Les psychiatres libéraux en Nouvelle-Aquitaine

Cette fiche, produite par l’URPS ML Nouvelle-Aquitaine, présente des informations concernant la démographie et l’activité des psychiatres exerçant en libéral.

Introduction

La santé mentale constitue un enjeu de santé publique majeur en Nouvelle-Aquitaine, à la fois par son ampleur, sa complexité et la diversité des besoins exprimés ou non exprimés.

Les chiffres les plus visibles concernent les formes les plus graves de détresse psychique : on recense chaque année environ 1 000 décès par suicide dans la région, ainsi que 8 400 hospitalisations pour tentative de suicide. Ces indicateurs font l’objet d’un suivi régulier et alimentent à juste titre la mobilisation des acteurs hospitaliers et des pouvoirs publics.

Cependant, cette vision hospitalo-centrée ne rend compte que d’une partie du spectre de la souffrance psychique.

En parallèle, un nombre bien plus élevé de personnes – adultes comme adolescents – traversent des périodes de troubles mentaux et de fragilité sans nécessairement être hospitalisées ou passer par les urgences. Ces personnes sont suivies en médecine de ville, notamment par les psychiatres libéraux, qui assurent une part essentielle, bien que moins visible, de la prise en charge ambulatoire de la santé mentale.

D’après l’enquête régionale Zoom Santé 2022 réalisée par l’ORS Nouvelle-Aquitaine, près de 22 % des personnes âgées de 18 à 75 ans déclarent avoir été confrontées à un trouble psychologique ou psychiatrique au cours de leur vie, et 8 % dans les 12 derniers mois. Ces proportions atteignent 12 % chez les 18-29 ans pour les troubles survenus dans l’année, traduisant une vulnérabilité accrue chez les jeunes adultes. En parallèle, 10 % de la population déclare avoir déjà pris des médicaments psychotropes prescrits, en dehors de toute hospitalisation.

Cette souffrance silencieuse, largement suivie en médecine libérale, reste pourtant sous-documentée dans les politiques publiques. En Nouvelle-Aquitaine, ce sont ainsi près de 2,9 millions d’actes psychiatriques qui ont été réalisés en secteur libéral en 2024, dont plus d’un million de consultations. Ces chiffres témoignent du rôle essentiel que joue l’ambulatoire dans le maintien de l’équilibre psychique de la population, dans un contexte de forte demande, de vieillissement des professionnels, et d’inégalités territoriales marquées.

Ce diagnostic propose ainsi de mieux comprendre la structuration, l’activité et les défis rencontrés par les psychiatres libéraux en Nouvelle-Aquitaine.

Contexte régional de l’offre psychiatrique

En 2025, 569 psychiatres libéraux ou en exercice mixte (Dénombrement : professionnels de santé libéraux et mixtes conventionnés ayant au moins un remboursement de soins dans l’année et présents au 01 juillet 2025 sont installés en Nouvelle-Aquitaine,

Avec une densité régionale de 9 psychiatres libéraux pour 100 000 habitants, la région se situe au troisième rang national, derrière l’Île-de-France et la région Provence-Alpes-Côte d’Azur. Cette moyenne masque cependant de fortes disparités entre les départements.

La répartition géographique est extrêmement inégale : plus de la moitié des psychiatres libéraux exercent en Gironde (322), soit une densité de 19 pour 100 000 habitants, tandis que la Creuse, le Lot-et-Garonne, la Corrèze comptent moins de dix psychiatres chacun, pour des densités comprises entre 2 et 4 pour 100 000 habitants. Les zones urbaines concentrent ainsi l’essentiel de l’offre, laissant les territoires ruraux en situation de sous-dotation importante.

Effectif de psychiatres par département

Densité (exprimée sur 100 000 habitants) des psychiatres par département

Source : RPPS 2025, exploitation URPS ML
Source : RPPS 2025, Insee 2024, exploitation URPS ML

Caractéristiques démographiques et formation des psychiatres

Le corps professionnel des psychiatres libéraux en Nouvelle-Aquitaine présente une structure d’âge vieillissante, avec un âge moyen de 56 ans. Seuls 18 % des praticiens ont moins de 40 ans, tandis que 42 ont 60 ans ou plus, dont un tiers a dépassé les 65 ans.

Source : RPPS 2025, exploitation URPS ML

Cette situation soulève des inquiétudes quant au renouvellement de l’offre dans les dix prochaines années, en particulier dans les zones déjà fragilisées.

Concernant leur formation, 65 % des psychiatres en exercice ont été diplômés dans la région, 32 % dans une autre région française et 3 % dans un autre pays européen. Ce bon taux de rétention post-internat constitue un atout qu’il conviendra de préserver et de renforcer.

Modalités d’exercice

La majorité des psychiatres (78 %) exercent exclusivement en libéral, tandis que 22 % combinent leur activité avec un exercice salarié, dont 7 % à l’hôpital.

Sur le plan organisationnel, l’exercice individuel prédomine largement : trois psychiatres sur quatre exercent seuls, contre seulement 18 % en cabinet de groupe. Cette configuration limite les dynamiques de coopération, d’innovation organisationnelle et d’attractivité pour les jeunes professionnels. Elle freine également l’intégration des psychiatres dans les dispositifs de coordination territoriale (CPTS, ESS…).

Lieux d’exercice des psychiatres libéraux

Source : SNIIRAM 2024, exploitation ISPL - URPS ML

Activité en psychiatrie

En 2024, près de 2,9 millions d’actes de psychiatrie ont été réalisés dans le secteur libéral en Nouvelle-Aquitaine. Cette activité est fortement concentrée : la Gironde à elle seule représente près de la moitié de l’activité régionale, avec plus de 1,3 million d’actes, contre moins de 50 000 dans la Creuse ou les Deux-Sèvres.

Source : SNIIRAM 2024, exploitation ISPL - URPS ML

Ce sont les départements où la densité de psychiatres est la plus faible qui enregistrent les plus forts volumes d’actes par praticien. Ainsi, chaque psychiatre réalise en moyenne 8 973 actes en Creuse, contre 4 286 en Gironde. Cette situation traduit une charge de travail particulièrement lourde pour un nombre très limité de professionnels, conséquence directe de l’absence d’alternatives locales. Elle révèle également un risque de saturation et d’épuisement professionnel dans ces territoires sous-dotés, avec pour corollaire une difficulté accrue d’accès aux soins pour la population.

Concernant le type d’actes, l’analyse détaillée des données issues de la facturation (source : SNIIR-AM 2024) met en évidence que près d’un quart des consultations ont été réalisées dans le cadre du parcours de soins coordonné, c’est-à-dire sur adressage du médecin traitant (73 6460 actes cotés « MCS »). Par ailleurs, l’activité de téléconsultation progresse : près de 72 000 actes ont été effectués en 2024 par 391 psychiatres libéraux (66% des psychiatres). Bien que cette modalité demeure minoritaire, ces chiffres témoignent de son inscription croissante dans les pratiques professionnelles, en réponse aux enjeux d’accessibilité, notamment dans les zones sous-dotées.

Enfin le revenu (source : DREES / Études et Résultats / décembre 2024, n° 1322 – Revenu des médecins libéraux) des psychiatres libéraux reste inférieur à la moyenne de l’ensemble des médecins spécialistes et reflètent un modèle d’activité à faible volume d’actes techniques, avec des durées longues de consultation, souvent peu valorisées. Près de 43 % exercent en secteur 2, mais les dépassements d’honoraires restent modérés. La faible progression des revenus pourrait être un facteur de désaffection pour la spécialité en libéral, dans un contexte de besoin croissant en santé mentale.

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